Je ne saurai trop recommander la lecture de la revue Médium, sous la direction de Régis Debray. Le numéro d’Octobre à Décembre est dédié aux Rythmes.
Le rythme est essentiel dans nos vies et l’on n’y prête pas suffisamment attention. Avez-vous déjà fait une marche en montagne ? Vous êtes-vous déjà laissé emporter par une valse ou un swing ? Le rythme porte l’action, lui donne un élan, une souplesse, une énergie qu’aucune mécanique, aussi agile soit-elle, ne peut procurer. Avez-vous déjà ressenti les difficultés d’être à contre-rythme ? de ramer contre les heures, les minutes ? Il n’y a rien de plus pénible pour le corps et pour l’esprit. Car dans le rythme, c’est là sa magie, il faut se laisser faire tout en gardant une certaine maîtrise. Le rythme relève tout autant de la confiance, que de la perception sensible du temps.
Rythmer le temps et employer son temps sont deux choses différentes. Le rythme nous porte et nous entraîne, l’emploi du temps et les plannings, nous fatiguent, en donnant l’illusion de la maîtrise. Un emploi du temps se remplit, et même électroniquement, un rythme se vit, tout simplement. Alors que veut dire « rythmer sa vie » ?
Alterner des vides et des pleins, temps forts et temps moins remplis, ne pas vouloir tout faire en même temps, se sentir habité par une durée intérieure, qui n’est pas celle des emails et des temps courts. Instaurer une certaine régularité dans sa vie, sous formes de rites et de rendez-vous joyeux pris avec soi-même.
Le moment du petit-déjeuner est un moyen (parmi d’autres) pour commencer à rythmer sa journée. Je commence par me poser, me nourrir, dans un environnement encore assez silencieux. Je me prépare pour l’action et prends le temps de ne pas y entrer trop vite. Je vais à « mon » rythme. L’arôme du café ou la couleur du thé varient insensiblement devant moi, j’écoute une musique que j’aime, je prie. Je sais qu’il va bientôt falloir partir, m’agiter. Tout est affaire d’alternance, de réglages et de passages. Le rythme est une façon d’habiter le temps sans s’y enfermer.
Christine Cayol